RADIO 3 EA
Good Friday
1986
N’est-il pas curieux que le symbole du Christianisme soit une croix, un instrument de mort affreuse? Les flèches d’Europe l’élèvent au ciel. Les rois ceignaient les diadèmes décorés de croix d’or.
La croix est en même temps signe de mort et de vie, de douleur atroce et d’entrée en vie. C’est un paradoxe.
Voyons un peu qui est cet homme qui pend, cloué à cette croix. Il était venu de Nazareth, village méprisé, situe en Galilée, province méprisée. Mais, la sagesse de son enseignement était telle qu’on devinait en lui la sagesse même. Ses paraboles étaient si belles, si complexes, si pleines de droiture et de tendresse qu’on sentait en lui un humanisme parfait. Les évangiles en sont témoins.
De même, les évangiles démontrent à maintes reprises qu’il choisit de mourir. Comment peut-il aimer les hommes sans partager leur sort ? Compatissant, il devait pâtir. La même volonté qui veut qu’il donne sa vie aux hommes le pousse à subir la mort des hommes. Moi-même qui vous parle aujourd’hui, devant les malades j’ai honte. Je reste muet parce que je ne connais pas leurs souffrances. Devant les prisonniers de conscience je ne suis rien, moi qui ne connait pas la prison. Jésus entre librement en sa passion pour qu’il ait part à la détresse humaine et pour se dire frère de tous.
Il entre dans la souffrance telle que seuls les innocents connaissent. La sagesse éprouve à l’infini l’horreur du mensonge. Cet homme parfaitement humain est infiniment sensible aux malheurs humains. Nul n’a souffert comme lui. Mort, mis au tombeau, il ressuscite. Sa vie est plus forte que la mort. La mort a fait ce qu’elle a pu. Dieu est plus puissant que le mal. La croix, instrument de la mort, devient moyen de vie.
La douleur a ceci d’affreux: nous nous sentons seuls. Depuis la mort de Jésus, ce n’est plus le cas. Notre souffrance, est-elle physique? Jésus nous dit: je connais ta souffrance et je la partage. Notre souffrance, est-elle morale? Jésus nous dit: j’ai connu le désespoir ; en ton désespoir me voilà gage d’un avenir. Notre souffrance, est-elle émotionnelle ? Jésus nous dit: mes amis m’ont renié, mon peuple m’a rejeté, j’ai même senti que Dieu mon Père m’abandonnait. Je suis avec toi. Je ferai, paradoxalement que tes épines soient roses, que tes douleurs soient utiles. Je n’enlève pas ta douleur; j’en enlevé le mal.
Depuis la mort de Jésus, il faut repenser la mort. Jésus mourant fait de nos peines et de nos joies des stages de vie. Voilà pourquoi nous l’appelons rédempteur du monde.